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TEMPS DÉPLOYÉ,
pour Stéphane

GALERIE DES URSULINES, TOURCOING

EXPOSITION

UNE EXPOSITION EN HOMMAGE À STÉPHANE CABÉE



Stéphane Cabée est né le 8 avril 1976. Après le Lycée, Stéphane Cabée s’inscrit à l’Université de Lens où il obtient un DEUG Math et Informatique Appliqués aux Sciences en 1997. Il fait une année d’études à l’Académie d’art plastique européenne de Lille, en 1997-1998 où il obtient le diplôme de l’ADPE puis entre à l’école régionale supérieure d’expression plastique de Tourcoing, l’ERSEP qui deviendra le site de Tourcoing de l’Esä. Il obtient son DNAP, l’ancienne appellation du DNA, en 2000 puis son DNSEP en 2002.


C’est donc en 2002 que démarre son activité artistique. Plasticien, il élabore à cette époque des installations qui questionnent nos rapports avec les espaces physiques et représentatifs. Il renoue rapidement avec ses premières affinités scientifiques et explore les potentiels créatifs des outils informatiques notamment en développant des interfaces d’applications. Au travers de ces nouveaux espaces de représentation, ses travaux s’enrichissent d’une réflexion critique sur les relations que nous entretenons avec les espaces dématérialisés de travail, d'échanges et de création mise en œuvre par les technologies du numérique. Net, Computing, Data ou Generative Art, sa démarche explore les rapports entre l’humain et la machine par le prisme des interfaces et de leur nature graphique, gestuelle ou encore orale. Ses dispositifs et installations questionnent l’essence, les potentiels et les frontières de notre existence numérique contemporaine.


Stéphane présentera son travail artistique lors de deux expositions personnelles : la première, « 3 Propositions », en mai 2009 à la Maison de l’Art et de la Communication de Sallaumines (et une de ses œuvres sera acquise par le Fonds Local d’Art Contemporain de Sallaumines, le FLAC), la seconde, « Make me dance », en octobre 2010 au Centre Culturel Gérard Philippe à Calais. Il participera également à plusieurs expositions collectives. C’est en 2003 qu’il rejoint l’équipe de l’ERSEP, qui deviendra l’Esä, comme enseignant. Il suivra alors une formation en programmation orientée web et 5 ans plus tard, une formation en programmation, capteurs et robotique. À partir de 2005, il s’investit aux côtés de Nathalie Stefanov et Gilles Froger dans le projet de la revue Parade qui aura au moins 6 numéros et dont il réalise le site Internet. Au sein de l’école, il crée en 2011 l’Atelier Numérique Transversal, intitulé avec humour Trans’At. Au sein de Tran’At, il propose workshops et conférences sur les questions de l’art et du numérique. Le site Internet de Trans’At devient rapidement un Centre de ressources où on trouve informations, liens et démos des outils dont les étudiants peuvent s’emparer.


À partir de 2015, il participe au double cursus ART-IMAGE dont il réalise le site Internet avec Lou Gallay, recrée le logo en 2019 et crée les chaines YouTube.


À partir de 2017, au sein de PRIST, il co-gère le Module de co-création Arts & Sciences dans le cadre du partenariat entre l’Esä et Polytech’Lille, en lien avec Nathalie Stefanov et Christophe Chaillou. Il crée également le site PRIST. Dans ce cadre, il participe comme artiste et enseignant en janvier 2018 à Collisions Art-Science, une soirée mêlant exposition, performances, conférences à l’Espace Croisé.


Il organise des Workshops à Tourcoing mais aussi en Chine, à Dalian en 2012 à l’Université polytechnique et à Tianjin en 2017 à la Tianjin Academy of Fine Arts, et il donnera une conférence dans ces deux universités.


Lorsque j’arrive en septembre 2021 à la direction de l’Esä, je fais la connaissance de l’ensemble des équipes de Tourcoing comme de Dunkerque et je commence à travailler avec les uns et les autres. Avec Stéphane et bien sûr en lien avec Martial qui est aujourd’hui à Tianjin et avec Nathalie Poisson-Cogez, nous avions commencé à travailler sur les outils pour préparer les étudiants à l’après école. Stéphane devait préparer un atelier spécifique pour la rentrée de septembre 2022. Enseignant depuis presque 20 ans dans l’école, ancien étudiant de l’école, ces questions lui tenaient à cœur. C’est un choc pour toutes et tous lorsque nous apprenons le 2 juillet sa disparition.


Je partage quelques mots que Martial m’a transmis aujourd’hui de Tianjin : « Stéphane était un enseignant hors pair, ce fut un ami cher. Ici, en Chine, il a toujours des amis. Il est d’ailleurs publié dans un livre que je ramènerai avec moi auquel il a participé et qui est dans le domaine art et science. En tant qu’artiste, il avait aussi mis sa carrière en retrait pour être toujours en création avec les étudiants… et même s’il râlait, il était toujours là ! J’espère enfin qu’il croisera Steve Jobs pour discuter et le convaincre d’acheter un PC Windows ! »


L’exposition que nous inaugurons ce soir, presqu’un an après son départ, est bien sûr un hommage à Stéphane Cabée. Elle a été pensée par Marie Lelouche, Leïla Pereira et Silvain Vanot pour lui ressembler. Une exposition avec des œuvres de Stéphane, des œuvres auxquelles il a participé d’une manière ou d’une autre et des œuvres amies, qui illustrent la générosité de l’homme et de l’enseignant. Donc ce soir c’est en quelque sorte une exposition d’amis que nous inaugurons dans un Temps déployé pour Stéphane avec les travaux de Stéphane Cabée, Véronica De Oliveira-Mota, Cécilia Diette, Julie Everaert, Lou Gallay, Julie Gaubert, Lisa Manchau, Lucie Métrier, Annaëlle Oestreich, Leïla Pereira, Vivien Perrot, Manon Thirriot, Mathurin Van Heeghe, Silvain Vanot et Nina Vase.


Je remercie les 3 commissaires et l’ensemble des artistes pour ce bel hommage à Stéphane.


Je remercie aussi les équipes techniques et administratives qui ont participé activement à la mise en place de cette exposition.


Thierry Heynen

Directeur Général de l'Esä | Dunkerque-Tourcoing

Discours inaugural de l'exposition, mercredi 10 mai 2023





Cette exposition célèbre le travail de Stéphane, celui de l'artiste comme celui de l'enseignant, parfois les deux en même temps. André Malraux a eu l'intuition du Musée imaginaire : "un domaine de formes qui nous habite". Stéphane qui était l'humilité même aurait bien ri à l'idée d'un musée. Nous aimerions juste que chacune, chacun d'entre nous, puisse s'offrir une salle imaginaire, rien qu'une salle, un espace rêvé pour créer, expérimenter, produire, partager un repas, chercher et parfois même trouver. Une salle aussi généreuse et inspirante que Stéphane lui-même.


Scénographie : Marie Lelouche


Ce qu'il restera, Stéphane Cabée, 120x67,5 cm, 2019, Image générative imprimée sur verre acrylique / Dans le cadre du programme de recherche PRIST


Ce qu'il restera s'inscrit dans le projet Narration effondrée qui questionne la fabrication d'images dans un contexte d'instantanéité, de dématérialisation et de remix numérique.

Il s'agit d'une série de photographies générées par l'écrasement d'œuvres cinématographiques qui traitent ou évoquent les relations entre l'espace, le temps et la narration telles que 2001 L'odyssée de l'espace, La jetée, Interstellar ou Voyage of time.

L'œuvre Ce qu'il restera restitue l'atmosphère du film An inconvenient Truth de Davis Guggenheim, réalisé en 2006. Les images s'élaborent en agençant des composantes d'espace, de temps et d'intention. Le protocole explore la représentation du réel.

Qu'elle soit captée par une caméra ou vécue en direct, l'expérience de l'espace et du temps est liée à l'action qui y est réalisée. Qu'est-ce qu'un espace sans temps ? Que devient une durée sans intention ? L'algorithme de traitement graphique du projet simule l'effondrement de chaque image de la vidéo traitée sur la suivante. À raison de 30 images par seconde, le programme combine des milliers d'images pour n'en restituer qu'une seule.

Le processus contracte la durée complète du film en un instant unique. L'image générée, trace résiduelle du temps, synthétise en une athmosphère colorée l'espace narratif qui se déployait dans l'œuvre originale.



IP Territory #, Stéphane Cabée, 2014, peinture numérique


L'impression est issue d'une série de peintures numériques générées d'après la base des données constituée par l'application web World IP Territory.

Cette appli trace, depuis 2009, la position des ordinateurs et serveurs internets nécessaires au fonctionnement du web. Elle transcrit la localisation sur une planisphère qui sert de canevas à la génération de cette série.



Il vit dans l’obscurité, Annaëlle Oestreich / Stéphane Cabée, 2022


Il vit dans l’obscurité.

Silence clair où il tâtonne avec certitude.

Dans l’intimité de sa chambre noire, ses icônes intérieures communiquent avec le regard des autres.

Son regard porte loin. Derrière le voile noir reposant sur son nez, c’est au-delà du visible qu’il se pose. Un œil cligne et retentit le clac de l’appareil, il vient enregistrer ce point de lumière et de chaleur. Silence atroce et impossible des images.

Il parle beaucoup pour occuper l’espace, mais paraît si serein dans le silence. De la couleur il n’a plus que le souvenir, de la lumière plus que la chaleur. De l’azur, du doré, du carmin, plus que l’impression dans son esprit de la jupe plissée, douce et volante dans le vide.


Il vit dans l’obscurité est une installation sonore et lumineuse inspirée par le travail et la vie d’Evgen Bavcar, philosophe et photographe aveugle. Au premier coup d’œil, il peut sembler que ce néon grésillant est simplement défectueux, il peut attirer l’œil ou brouiller la lecture de l’exposition. Dans une volonté d’interprétation du texte qui ne passe pas par la lecture, nous l’avons traduit en morse, rendant hommage à son auteur.





ANTIDUNE “Bons souvenirs de la côte”, Leïla Pereira en collaboration avec Stéphane Cabée, 2019


Bons souvenirs de la côte (https://www.leila-pereira.com/artpiece/webSearchContour/) est un programme web de cartographie générative. Les données qui le composent sont issues d’une collection de 219 cartes postales de la côte d’Opale couvrant l’ensemble du XXe siècle.

Dans une barre de recherche, vous êtes invité·e à entrer un souvenir de vacances (un mot, une phrase, un prénom, une date …) Le résultat de la recherche se fabrique sous vos yeux, puisant dans une base de données constituée de textes et informations collectés sur les cartes postales. Chaque image qui apparaît est issue du traitement d’une carte par un algorithme développé par Stéphane. Sur l’écran, apparaît ainsi une cartographie de votre souvenir, fragment d’une mémoire passée.



Contour, Véronica De Oliveira-Mota, 2022


Contour est une installation à la frontière entre la reconnaissance d’un être et son absence, dans une lutte pour son identification. Le fait que la silhouette projetée puisse réagir à la position d’une personne à proximité d’elle peut être la démonstration d’une pseudo-conscience du monde qui l’entoure.

Elle est assise, là, et elle attend. La silhouette est une présence passive qui n’existe dans le lieu d’exposition que pour montrer qu’elle a conscience de la réalité des spectateur·rices et de son abstraction à elle.



Of flesh and pixels, Nina Vase & Stéphane Cabée, 2022 / Dans le cadre du programme de recherches PRIST


Of flesh and pixels permet à chaque spectateur·trice d’explorer à chaque spectateur·rice la notion d’incarnation. En s’observant à la troisième personne, par le biais d’un dispositif constitué d’un casque de VR et d’un harnais, l’objectif est à la fois de le·la déposséder de son corps pour voir la façon dont iel interagit avec le monde qui l’entoure, mais aussi de questionner nos rapports à la technologie, qui ont inéluctablement changé nos modes perceptifs du réel.

Le projet est à voir comme une extension du corps, un nouveau membre, qui ferait de nous des humains augmentés, précipitant encore un peu plus notre arrivée dans une ère post-humaniste.




© Leïla Pereira

Les mondes parallèles V2, Vivien Perrot, Espace virtuel explorable, scan en photogrammétrie d’espaces d’habitation, 2022


Les mondes Parallèles est une pièce construite dans une volonté de sauvegarder des espaces liés à l’humain, comme on préserve des espaces naturels. C’est un espace virtuel explorable composé de plusieurs pièces d’habitation bien réelles scannées en photogrammétrie et modélisées en 3D, elles sont chacune liées à une personne avec sa personnalité propre.

L’environnement, composé de plusieurs strates, représente des espaces à un moment donné de notre vie : des traces, souvenirs sont récupérés sous forme de données et préservés en tant qu’archives humaines. Les environnements de notre vie portent un potentiel narratif qui peut se définir selon la manière de le percevoir ou l’expérience que l’on y développe.



© Leïla Pereira

Viral Poetry, Lou Gallay, Site web (http://charlesgallay.fr/viralpoetry/), hack, 2020


[...] détournant la machinerie cellulaire au profit de sa réplication [...] ce qui suggère un dépouillement, un assujettissement : le code des pages web se réécrit au profit d’un texte étranger. À chaque lien, le processus se propage : il s’agit du caractère viral transposé à l’écriture. En hackant l’ADN du site hôte, les poèmes apparaissent et croissent. Cette méthode d’aliénation semble impériale ou violente puisqu’elle altère une intégrité. C’est une virilité condamnable dont la poésie et sa soif de sublime se sont souvent rendues coupables. Cependant, en occupant, détournant un espace, on y trouve un rappel de méthodes de résistance. La rencontre des formes crée certainement de l’étrangeté. Et ceci me semble salutaire.



Anemo, Annaëlle Oestreich & Stéphane Cabée, 2020-2022 / Dans le cadre du programme de recherches PRIST


Anemo est une installation composée d’un ventilateur, soufflant en temps réel le vent de Dunkerque. Cette pièce invite le·la spectateur·rice, au sein de l’espace d’exposition à se “connecter” d’une façon technologique au vent du littoral.

Anemo est une réflexion sur le terme « inspiration » dans sa double acception : défini à la fois comme un souffle créateur et une bouffée d’air dans les poumons. Ce projet, travaillé avec Stéphane Cabée sur presque deux ans, a été réfléchi lors des différentes périodes de confinement, durant lesquelles nos relations avec notre environnement ont été réduites et repensées.




Clara, Cécilia Diette, 2022


Clara est conçue pour accueillir chaque personne entrant dans la galerie. Elle interagit avec vous telle une médiatrice. Quand vous entrez, elle détecte votre présence et vous décrit, d’une voix accueillante, les œuvres qui n’ont pas pu être montrées dans l’exposition.





Prototype d’expression, Stéphane Cabée, 2018, Bug d’impression 3D


Le processus créatif débute généralement avec le croquis et se finalise avec l’objet, l’erreur de la machine renvoie ici l’objet à l’état de dessin et renverse les rapports entre intentions et œuvres.



Sans titre, Stéphane Cabée


Cette pièce a été conçue avec Grégoire Chotteau à l’esä, alors que Stéphane assistait Daniel Patin, enseignant de sculpture. Stéphane cherchait à figer dans le bois le motif dessiné par la fumée.

Stéphane a d’abord été un de nos élèves, progressivement il est devenu un compagnon d’atelier très recherché. Nos rapports sont vite devenus professionnels avec cette spontanéité propre aux liens solides créés par le travail.

Il a été l’une des plus belles rencontres de ma vie de professeur. Sa générosité et son enthousiasme seront toujours présents dans nos ateliers.

Daniel Patin.



Géométrique 1, Manon Thirriot, Sphère en noyer, Ø 40, 2022

Avec le soutien technique de Stéphane Cabée et de Marc Lemichez


D’abord présentée en dialogue avec l’installation Trajectoires anachroniques (2022), la sphère Géométrique 1 est ici exposée de manière autonome.

Elle est la première sculpture d’une future série autour de figures géométriques.

À travers la représentation de la sphère, Manon Thirriot s’intéresse à la dimension transversale de certaines formes géométriques qui ont la capacité de migrer dans différents champs à savoir l’histoire de l’art et de l’ornement, les sciences et les techniques artisanales.



Dynamique sonore, dimension durable, Lucie Métrier & Stéphane Cabée, 2020 / Dans le cadre du programme de recherches PRIST


Par une journée pluvieuse, j’ai invité un groupe de personnes à participer à une marche sonore dans un lieu naturel. L’intention était qu’elles prennent le temps de tendre l’oreille, de s’initier à la bioacoustique en prêtant attention à chaque son, chaque changement de dynamique, en déambulant à un rythme normal. Préalablement, Stéphane Cabée et moi-même avions travaillé à détourner l’usage du smartphone pour qu’il enregistre les sons captés lors de cette marche et les interprète visuellement. Chaque participant·e a téléchargé sur son téléphone l’application, créée par Stéphane. Une fois la marche effectuée, le·la participant·e peut découvrir les images générées grâce à une exposition, ou bien en les recevant par mail. Ce dispositif lui permet de se laisser imprégner par la nature durant la marche et non par la technologie. Nous espérions que l’expérience donnerait envie au·à la participant·e de réitérer des marches sonores par lui·elle-même pour découvrir de nouveaux sons et leurs images.



Guitare continue, Silvain Vanot, 2018-2023, Dispositif instrumental imaginé par Silvain Vanot, réalisé par Stéphane Cabée et perfectionné par Mathurin Van Heeghe.


Cette pièce a été initialement conçue pour une journée du son consacrée au papier. Un bottin fixé à un axe venait, en tournant, frotter les cordes. Nous expérimentions, depuis, d’autres dispositifs pour une vaste installation participative dont une caisse claire « jouée » par un canon à cotillons… Reste ce prototype de guitare continue perfectionné par Mathurin grâce à des modules adaptables qui permettent un jeu plus régulier et des nuances d’interprétation.








Pertubation(s), Lisa Manchau, Captation vidéo / Double pendule, acier et béton fibré, son, capteur, programmation numérique, 2018


Perturbation(s) est un dispositif cinétique en temps réel. À travers son mouvement hypnotique il retranscrit par la forme optique et sonore le résultat d’une trajectoire erratique, fruit du balancement simultané de ces deux pendules.




En temps d’espace, Stéphane Cabée, Captation vidéo / Vidéo mapping sur impression 3D / 60x34x9cm, 2017 / Dans le cadre du programme de recherches PRIST


La pièce s’inspire de la proposition qu’émit Einstein enfant : « Comment verrai-je le monde, juché sur le dos d’une particule lancée à la poursuite d’un photon ? »

Cette proposition et le contexte des laboratoires d’études des particules m’ont conduit à élaborer un protocole d’expérimentation du temps et de l’espace qui se révèlent bien plus relatifs à l’échelle nanoscopique ou cosmologique que la sensation que nous en avons.

J’ai proposé à Philipp Schmidt-Wellenburg, physicien au Paul Scherrer Institut, de suivre le trajet des particules projetées dans la boucle du synchrotron de source lumineuse du PSI. Equipé d’une caméra positionnée au niveau du regard, Philipp a enregistré une vidéo de 3’26 qui retrace son trajet à pied autour des 288 mètres du synchrotron. L’enregistrement est ensuite traité par un algorithme qui écrase chaque image de la vidéo sur la suivante et condense l’ensemble des plans en une unique représentation résiduelle. Cette image, atmosphère colorée persistante de l’espace, devient la matrice sur laquelle se base l’impression 3D. La vidéo initiale est ensuite mappée sur ce volume. L’ensemble du processus produit un objet singulier, mouvant mais immobile, un volume inerte, qui semble respirer, situé entre le temps et l’espace.



Panellus Stipticus, Julie Everaert, Captation vidéo / installation interactive, 150 x 80 cm, 2021 / Dans le cadre du programme de recherches PRIST


L’objectif de cette pièce est d’interagir avec l’espèce de champignon Panellus stipticus et d’exploiter sa capacité bioluminescente. L’installation, réalisée avec la technique de l’impression 3D, interroge nos liens complexes avec les modes d’organisation en groupe des organismes vivants dans le règne végétal. Lorsque le·la visiteur·euse se rapproche de l’installation, le champignon active son effet bioluminescent. Quand le·la spectateur·rice s’éloigne, le champignon de synthèse se recharge électriquement, contrairement au champignon vivant qui a besoin d’eau pour grandir. Le principe de mimétisme est donc mis en avant de manière technologique.

Ce projet a bénéficié du soutien de l’École Centrale de Lille.



Orgue de barbarie, Mathurin Van Heeghe, Captation vidéo / installation


Il m’aura fallu travailler deux années en étroite collaboration avec l’entreprise Cogez, un atelier de facture d’orgues, pour assimiler le langage technique et les outils nécessaires à la fabrication de l’installation. Le projet Orgue de Barbarie est l’occasion de donner à voir et entendre les gestes et savoir-faire du passé.

Après trois années de collecte d’une centaine d’obus sculptés de la Grande Guerre, mon intention était de parler de ces objets, du moins “les faire parler”. L’expression est employée dans le métier de facteur d’orgue à l’étape de l’harmonisation où les premières sonorités du tuyau d’orgue prennent vie.

La douille d’obus sculptée est un objet d’art populaire que nous avons tous·tes pu entrevoir sur les cheminées de nos grands-parents. Lors de la Grande Guerre, dans les rares moments d’accalmie, à l’arrière des lignes de fronts, les soldats sculptaient ces douilles, les gravaient, martelaient, guillochaient, ciselaient, repoussaient. On y retrouve diverses formes végétales (feuilles de chênes, houx, lierre), animales (coq, chien, oiseaux) ou des mentions pour des êtres chers (coeurs, prénoms). Ces gestes et représentations, reliés à l’art brut, donnent poésie et humanité à la vie des soldats. Ils contrastent avec le fracas des obus qui réduisaient les plaines en paysages lunaires.



Optimist, Julie Gaubert, Accastillage et gréement d’un optimiste, 2020


Optimist est une installation donnant l’illusion de naviguer sur terre. En détournant un optimiste (petit voilier), je propose un objet hybride, ayant comme coque le sol. Le bateau devient la Terre, la performance devient image. Cette action donne à voir une lecture poétique de nos vies, d’histoires individuelles mais aussi collectives. C’est une proposition pour prendre part au présent, un engagement, bien sûr fictif et imagé ; questionnant à son tour les tournants et horizons du présent, un parallèle de notre monde actuel. Avec humour et dérision, on peut y voir une source d’espoir, où le trajet n’est pas encore tracé : c’est donc à nous de prendre les rênes, amenant ce navire vers d’autres horizons.

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